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Pour mémoire : Les similitudes nombreuses du basque et de langues indo-européennes anciennes révélées à travers tous nos articles, ne peuvent pas être exclusivement attribuées à l'emprunt des Basques aux langues des peuples qu'ils rencontrèrent. Souvent même, nous pouvons fortement supposer avec quelques raisons que ce pourait bien être l'inverse ... à suivre ...
(35) Les 7 péchés capitaux - 1ière partie
 
Il s'agit pour mémoire de la paresse, l'orgueil, la gourmandise, la luxure, l'avarice, la colère et l'envie. Il est bien connu que lesdits péchés ne portent pas bien leurs noms et que Thomas d'Aquin avait raison quand il écrivait qu'il s'agit plus de vices susceptibles d'engendrer de vrais pêchés. [1]

En somme, il s'agit plus d'erreurs (de comportement) et de faux pas (dans la mauvaise direction), ce que l'on pourrait rapprocher du basque PET(T)O, terme également utilisé pour désigner (ce qui n'est pas vraiment capital) un "coup raté à la pelote" et un "impair de discours ou de geste". Le terme grec (curieusement voisin pour la phonie comme pour le sens !) πταίω [pteaiō] n'entre pas dans ces nuances avec pour signification "buter, tomber" et, au figuré, "faire une faute" ou "une erreur".[2]

Le qualificatif capital (du latin caput "tête") est une simple métaphore : comme la tête commande le reste du corps, les péchés dits capitaux peuvent en commander d'autres nettement plus graves. Cette remarque est là pour rappeler qu'une autre expression indo-européenne de tête est donnée par le radical *KER- (signifiant également "objet dur, corne"), en grec κάρᾱ [kárā] que nous avions rapproché du basque GARA "idée d'élévation, de crâne, ..." [article N° 7].
 
La paresse … intellectuelle

C'est surtout ce type de paresse que visait Thomas d'Aquin dans ses écrits, que l'on nommait acédie, qui signifie à l'origine manque de soin notamment spirituel. Cette notion fut même assimilée à chagrin, tristesse (de l'âme ?) vers le milieu du premier millénaire [3].
Cette dernière interprétation conduit au basque MIN/MINA/MEN intervenant dans beaucoup de termes traduisant la douleur physique ou morale … et dont on retrouve l'usage dans plusieurs langues indo-européennes [4].

Avec le même sens de "peine, chagrin", le grec a par ailleurs ἄχθομαι [ákhthomai] et ἄχθος [ákhthos] dont la signification première se rapporte à la notion de "charge, fardeau". Et, à cet égard, le rapprochement d'avec le basque AKITU "(se) fatiguer, être fatigué" est très probable.

Mais le grec a aussi le qualificatif φαυ̑λος [phaȗlos] dont le sens (appliqué à la conduite des hommes) est "insouciant, léger, paresseux", ce qui pourrait être rapproché du basque AHUL signifiant notamment "sans force, sans caractère, insipide … " [5].

 
L'orgueil

Le verbe basque PUZTU "(s)'enfler, s'enorgueillir …" est de la même famille que P(H)UTZ "souffle" que nous avons déjà rencontré [article N° 7]. C'est donc sans surprise que nous le rapprochons des termes grecs φύσαω [phusaō] "souffler, gonfler, enfler", φυσιόω [phusioō] "enfler d'orgueil" et φύσιωτις [phusiōtis] "orgueil".
 
Référence malicieuse à la mythologie grecque du minotaure, mi-homme, mi-taureau,
assimilé ici au bœuf que voulait imiter la grenouille d'Esope ... avant La Fontaine.

P(H)UTZ
"souffle"


PUZTU
"s'enfler, s'enorgueillir"
 
φύσαω [phusaō]
"souffler, gonfler, enfler"


φυσιόω [phusioō]
"enfler d'orgueil"


φύσιωτις [phusiōtis]
"orgueil"
 
Pays basque
Grèce antique
 
 
[0] Les mots "entre [ ]" donnent la prononciation des termes grecs (en bleu) à l'aide de l'alphabet phonétique international. Tous les autres mots "en bleu italique" sont également écrits à l'aide du même alphabet phonétique.
[1] Thomas d'Aquin dans sa « Somme théologique » (question 84, Prima secundae) au 13ème siècle. Il fut canonisé en 1323, puis élevé à la dignité de Docteur de l'Église par le pape Pie V en 1567.
[2] Eñaut ETCHAMENDY dans euroskara.com s/[Lexique] PETTO (à prononcer « pétio »)
[3] Acédie : du grec κδεια [ákḗdeia] "négligence, indifférence" lui-même issu du verbe κηδω [ákēdéō] "ne pas prendre soin de" et notamment des morts. Sous le Pape Grégoire 1ier (dit le Grand) l'acédie fut assimilée à la tristesse (de l'âme ?) et, plus tard, définie par Thomas d'Aquin par le refus d'accomplir des tâches nécessaires [spirituelles].
[4] Quelques mots basques intégrant MIN : MIN-BERA "douloureux, sensible", HERRI-MIN "nostalgie" (littéralement "mal du pays"), JAKIN-MIN "curiosité de savoir" ... E. ETCHAMENDY rapproche MIN du radical indo-européen *men- présent dans des mots faisant référence à la pensée tels que : (védique) mamné, (gothique) mam, (lituanien) mîni "je pense", (vieux slave) mînitu "il pense", (latin) mens "pensée" ...
[5] Dictionnaire basque-français de Pierre LHANDE (1926)
 
 
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